#ITW : Emma Daumas : “Le succès, ça te déconnecte de la réalité”
Le 15 janvier prochain, Emma Daumas proposera à son public de découvrir sur son site Internet son quatrième album “L’art des Naufrages”. Une semaine plus tard, l’opus sera disponible en digital ainsi que sur les plateformes de streaming. Fruit de plusieurs années de travail, ce nouvel opus fait suite à l’EP “Vivante” paru en 2016 et il est l’occasion pour la chanteuse de se faire plaisir tout en partageant avec son public. Résultat d’une campagne KissKissBankBank réussie, “L’art des Naufrages” est également pour Emma Daumas, l'occasion de tenter plusieurs choses. Doux, pop, pétillant, parfois surprenant, l’opus est celui d’une artiste libre. À l’occasion de la sortie de ce projet, Emma a accepté de répondre à nos questions. Son nouvel opus, ses débuts, la pandémie ou encore la Star Academy, rencontre avec une artiste qui a fait son petit bout de chemin.
Emma Daumas - "L'art des naufrages" |
Salut Emma, comment te sens tu à l’aube de la sortie de ton nouvel album “L’art Des Naufrages”
Pour l’instant, je ne réalise pas trop. Le projet a tellement été repoussé que j’ai un peu de mal à réaliser. Malgré tout, grâce au premier single “Les Jeunes Filles en Fleurs” qui a reçu un bon accueil, ça m’a un peu remis le pied à l’étrier. Cet album, il me ressemble, il fera sa vie mais je sais que j’en suis fière.
Tu parles de reports, pourquoi ?
Pour mon précédent projet “Vivante”, j’avais signé sur le label Abacada aux côtés de Danièle Molko. Elle avait compris beaucoup de choses à mon univers et elle m’a aidé à aller vers quelque chose de plus humain, de plus artisanal. Hélas, Danièle est décédée précipitamment en 2017. Après ça, je n’avais plus envie de sortir l’album qui devait arriver. Je n’avais pas non plus la force de démarcher les maisons de disques. Pour avancer, j’ai eu besoin de trouver une démarche artistique qui m’aiderait à exorciser ma peine. Tout est parti de la chanson “L’art des Naufrages” qui donne aujourd’hui son nom à l’album.
“L’Art des Naufrages” est donc directement inspiré du tragique décès de ton amie et collaboratrice Danièle Molko ?
À la base, j’ai écrit cette chanson pour elle alors qu’elle était encore vivante. Elle vivait des épreuves difficiles et je voulais lui faire comprendre qu’il y avait moyen de s’en sortir même lorsqu’on est perdu au milieu de la tempête. Lorsqu’elle est décédée, j’ai dû me l’appliquer à moi-même. J’ai dû mettre les mains dans la matière pour rebondir et me retrouver.
Cet album est financé par le public. Pour quelles raisons ?
J’ai vu dans ce processus, un moyen de rassembler mon public. J’avais également besoin de savoir s'ils étaient toujours là. En parallèle, j’ai fondé avec des amis sur Avignon, ma propre structure: “Les Enfants Sauvages Music”. Je crois que j’avais besoin de liberté et j’ai pris goût à l’auto-gestion. Avec ce financement participatif, je pouvais conserver mon indépendance tout en travaillant d’une certaine façon avec mon public.
La musique que tu fais aujourd’hui n’a plus rien à voir avec celle de tes débuts. Qu’est-ce qui t'a mené vers ce chemin ?
Lorsque j’ai commencé, j’étais extrêmement jeune. J’ai été prise dans un tourbillon médiatique sans précédent. Depuis le départ, mon envie était d’aller vers ce genre de sonorités mais je n’ai pas eu le temps de mûrir mes réflexions, de digérer mes envies. Le succès, ça te déconnecte de la réalité. La célébrité dénature les relations humaines. Pour arriver à ce résultat, j’ai dû déconstruire mon parcours pour revenir à quelque chose de plus simple. Au fil de ma carrière, je ne me suis jamais rien interdit, j’ai testé différents styles et c’est tout ce cheminement qui me permet aujourd’hui, d’être en phase avec ma quête artistique.
Quel regard portes-tu justement sur tes deux premiers albums ?
Mon premier album est celui qui m’a aidé à passer d’Emma de la Star Ac à Emma Daumas et c’était déjà un grand pas (Rires). Je suis très attachée à ce projet car il m’a ouvert des portes et je suis également très chanceuse d’avoir eu un succès populaire avec “Tu Seras” qui continue de me lier au public. Pour “Effets Secondaires”, j’étais dans une période sombre et j’avais besoin de faire du bruit, de crier mon mal-être. Il m’a permis de comprendre que je n’étais pas sur la bonne voie mais j’en suis fière quand même car j’ai pu y imposer des choses et notamment des textes.
"mon maître-mot c’est de ne rien m’interdire"
Pour en revenir à ton nouvel album, j’ai adoré le titre “À la Folie”. J’ai eu l’impression de retrouver la Emma du deuxième album mêlé à du Fishbach. Tu peux nous parler de ce titre ?
Avec mon réalisateur, on a écouté beaucoup de musique pour faire ce disque. “L’art des Naufrages”, c’est un album construit par tableaux, il fonctionne par paysage. Sur “À La Folie”, je voulais quelque chose de viscéral, de décalé et pour moi, celle qui incarne le mieux cette esthétique, c’est Bjork. Comme elle, je voulais libérer mon chant et ne rien m’interdire.
En parlant de ne rien s’interdire, tu chantes un titre en anglais sur cet album pourquoi ?
Car c’est venu assez naturellement, tout simplement. Quand j’ai travaillé sur la mélodie de “Mermaid Blues”, j’ai pensé à la BO d’un film des années 50, je pensais à l’Amérique. Pour en revenir à l’anglais, j’ai toujours été très liée à cette langue que j’avais déjà essayée sur mon troisième album, comme tu l’as compris, mon maître-mot c’est de ne rien m’interdire.
Tellement de choses (Rires). J’ai mes récurrences; Les Beatles, Michael Jackson mais également la musique brésilienne qui m’a beaucoup apporté. Dans la chanson française j’adore les expérimentations de Camille, la voix de Yaël Naim et sur la nouvelle scène française, j’adore ce que fait Yseult, elle a une proposition et ça fait du bien. Pour moi, la musique doit aller avec les envies. Je peux écouter Édith Piaf, Dalida pour son côté crooneuse un peu triste mais également la musique tzigane et celle des Balkans.
Je pense que je fais de la POP. C’est de la POP dans le sens ou ça mélange plusieurs styles. Je pourrais aussi dire que c’est de la POP organique. Aujourd’hui, tout le monde fait de la POP urbaine, de l’électro, je ne me reconnais pas trop là-dedans et j’essaye de me démarquer par le texte, par la voix.
Tu t’es surtout fait remarquer scéniquement ces dernières années. Quel regard portes-tu sur 2020 ?
C’est un désastre. Personnellement j’ai été épargné par ce fléau car je travaillais sur le nouvel album mais je n’ai fait qu’assister au naufrage des tournées de mes collègues artistes. Je ne veux pas faire de politique mais comme le dit l’expression “l’enfer est pavé de bonnes intentions”. Je pense que les gouvernements veulent bien faire mais ils ne font qu'entretenir la terreur et la peur de l’autre. La culture avait le pouvoir de maintenir l'humanité et là, on n’y est pas.
Je l’espère. Je ne peux pas trop en dire mais une date se prépare. Pour le plus gros de la tournée, il faudra attendre la fin de l’année, voire 2022. Je laisse d’abord la place à ceux qui n’ont pas pu en profiter en 2020.
Tu as sorti un roman en 2016, peut-on s’attendre à un nouveau livre dans le futur ?
(Rires). L’écriture d’un roman c’est dévorant et pour le moment, je suis trop occupée pour vraiment m’y atteler. J’écris encore mais j’ai besoin de trouver le temps et l’espace nécessaire.
La Star Ac fêtera ses 20 ans en 2021. Tu feras parti de la fête ?
Personnellement, je ne renie pas la Star Ac. Comme une adolescente qui repousse ses parents, j’ai peut-être été dure avec l’émission mais aujourd’hui, j’ai l’impression d’avoir tellement de choses à défendre que ça ne me dérange plus. Donc oui, je serai, en 2021, dans la célébration de ce programme fondateur pour ma carrière.
Commentaires
Enregistrer un commentaire