#ITW : Beautiful Badness - "le meilleur prof que j'ai eu s'appelle Jeff Buckley"


Enfant des années 90’s, Gabriel Sesboué a fondé en 2011, le collectif musical “Beautiful Badness”. Fruit d’un très vieil amour pour la musique, le projet s’est fortifié sur scène mais également au travers de plusieurs EPs qui ont les uns après les autres fait mûrir ses sonorités et sa profondeur. Inclassable, “Beautiful Badness” est une pépite en fusion qui vient une nouvelle fois de s’enflammer sur son dernier EP “Walking On A Mirror” paru en mars 2019. À cette occasion, Gabriel a accepté de décortiquer sa progéniture artistique. Rencontre avec un passionné. 

Gabriel Sesboué nous raconte Beautiful Badness
Gabriel Sesboué nous raconte Beautiful Badness

Beautiful Badness, c'est un joli jeu de mots… Pourquoi ce choix ? 

C'est un nom qui décrit à la fois bien ce que je trouve intéressant et émouvant la plupart du temps dans le quotidien, et à la fois les contrastes présents dans ma musique. Une chanson triste avec des paroles tristes et des sonorités sombres, c'est un peu indigeste et lourd. De la même manière un rythme enjoué pour raconter des choses positives, on bascule vite dans la naïveté... En revanche, dès que ça devient ambigu, c'est plus touchant, plus fort. Dans mes compos, on a souvent une voix et des mélodies très aériennes pour le côté "Beautiful", et j'aime bien venir les salir avec des sons synthétiques, des basses et des rythmiques plus "badness"... La nostalgie, qui est le sentiment à la base de presque toutes mes chansons, est une sensation comme ça, très ambiguë, mêlée de douceur et de regret en permanence...


L'univers de ta musique est empreint des années 90's, on le remarque notamment avec ta superbe reprise du titre "I'll be there for you" qui servait de générique à la série « Friends ». C'est la nostalgie de ton enfance ? 

Oui, entre autres. Je voulais vraiment essayer de trouver un hymne, un symbole des 90's, et l'éclairer avec un regard moderne, histoire de voir le chemin parcouru par la société, et en particulier par ma génération, depuis 20 ans. Ce chemin il est impressionnant, parfois cool, parfois un peu effrayant. Ce qui est sûr, c'est que la génération "Y" comme on nous appelle, est vraiment comme écartelée entre deux mondes. On est la première génération à s'être approprié le web, on a inventé les réseaux sociaux... Et en même temps on est la dernière génération à avoir pu vivre dans un monde où ça n'existait pas, et où les rapports étaient vraiment différents. Bref, de quoi devenir un peu schizo... Je voulais vraiment faire un titre et un clip pour tous les gens de mon âge qui comme moi se sentent parfois un peu déboussolés par ça. Reprendre le générique de Friends, et le transformer en une version sombre et "robotisée" m'est apparu comme un moyen évident.


Comment en es-tu arrivé à monter le projet musical que tu défends aujourd'hui ? 

J'ai quitté ma ville natale de Lyon en 2010, après plusieurs projets amateurs et semi-pros. Arrivé à Bruxelles, j'ai voulu vraiment créer un projet personnel, dans lequel je pouvais composer suivant mes envies, sans concessions. ça m'a permis de développer ce côté lyrique toujours plus loin, avec quand même beaucoup de tâtonnements et de coups ratés (Rires). Puis rapidement j'ai été rejoint par des musiciens bruxellois qui m'ont suivi dans la prod de mes 2 premiers EPs et surtout sur scène. Il y a eu du turn-over, mais certains sont quand même toujours là 7 ou 8 ans plus tard.

Tu as une voix particulièrement lyrique. As-tu pris des cours pour en arriver là ? 

Très peu. Quelques cours m'ont quand même permis à franchir de vrais caps. Mais j'ai beaucoup appris et travaillé seul. Le meilleur prof que j'ai eu s'appelle Jeff Buckley. Des heures passées à essayer de chanter ses morceaux m'ont appris à faire naviguer ma voix entre tous les registres et à développer mon aisance dans le "falsetto". Je dirais aussi que sans l'avoir étudiée, j'ai été très éveillé à la musique classique d'abord par mes parents, puis ensuite en chantant en chorale. Tout ça a fait que j'ai à la fois cette influence de la musique classique très fortement, et à la fois le parcours de l'autodidacte. C'est une combinaison pas si fréquente et peut-être que ça participe à l'originalité du projet. 


Reprise, réarrangement, pop, électro... c'est difficile de classifier ton projet. C'est un choix de ta part ? 

C'est toujours la question insoluble. On veut à la fois ne pas être dans une case existante, sans quoi ça veut dire qu'on n'a rien inventé, et en même temps on veut pouvoir être classable, sans quoi ça veut dire que notre identité est floue et impossible à cerner pour le public. Bref, je pense que résoudre ceci sera l'objet de toute ma carrière. Et j'ai déjà fait beaucoup de chemin. Au début, c'était un projet pop-rock très flou comme des millions d'autres, aujourd'hui j'aime bien dire que je fais de la pop-indé aux accents lyriques. 

La scène musicale belge est de mieux en mieux représentée à l'étranger (Angèle, Roméo Elvis, Stromae, ...) d'où vient selon toi cette explosion ? 

Stromae y est sans doute pour beaucoup. Le dynamisme permanent de la scène belge aussi. Avant on avait déjà des Girls In Hawaï, Ghinzu... La Belgique était déjà productive dans les styles dominants de l'époque. Enfin, je crois que la nouvelle génération hip-hop est très différente de celle des 90's. Dans les 90's, il y avait un message assez "énervé". Dans la revendication, dans le débit de paroles, parfois dans la violence. Tout ça était assez sérieux. Le hip-hop d'aujourd'hui, j'ai le sentiment qu'il porte un message plutôt de lâcher prise. Le message c'est plutôt "on s'en bat les c...". On est moins sérieux, et surtout il y a beaucoup plus d'autodérision. Et quand il s'agit d'autodérision, de ne pas se prendre au sérieux, les Belges auront toujours culturellement une longueur d'avance sur les autres... 

Après ce nouvel EP, as-tu déjà prévu d'autres projets ? (album, tournée, …) 

Cet EP, c'est le premier volet d'un album de 12 titres qui a été enregistré il y a quelques mois avec le producteur français Marlon B (Juliette Armanet, Brigitte, Benjamin Clementine...). Il y a donc un album dont la date de sortie n'est pas encore connue, mais qui suivra assez vite. Côté tournée, ça a démarré. Deux concerts pour fêter la sortie de l'EP. Un complet au Botanique à Bruxelles en avril, et un prévu pour le 20 mai au 1999, à Paris. Ensuite on sera dans les grands festivals tout l'été jusqu'en septembre en Belgique. Et on espère très bientôt être de retour en France. Les dates sont annoncées sur Facebook et bientôt sur le site web de Beautiful Badness.

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