Sevdaliza : l’artiste iranienne qui désacralise les genres

Une claque, il n’y a pas d’autres mots pour qualifier l’effet que nous a fait le nouvel album de Sevdaliza. Nouvelle figure de proue R&B alternatif, l’artiste iranienne confirme son talent sur un second opus profond et captivant. Moins populaire que ses consoeurs Grimes ou encore FKA Twigs a qui on la compare très souvent sur le web, l’artiste n’en reste pas moins singulière et il y a fort à parier que son travail vous ensorcelle.

Sevdaliza incroyablement surprenante sur "Shabrang" 

Une artiste pas comme les autres

Des artistes aussi inspirés que Sevdaliza, il n’en existe que très peu sur la scène internationale actuelle. Impliquée dans son art, elle avait déjà, avec son premier album “Ison” paru en 2017, puis avec son EP “The Calling” un an plus tard, posé les bases d’un univers aussi hypnotique que stupéfiant. Explorant avec sa musique, la complexité du monde et des êtres humains, elle avait réussi à travers les sonorités et les ambiances présentent sur ses projets à repousser les limites de la POP. Inclassable, inqualifiable, le genre exploré par l’artiste de 32 ans ne répond à aucun référencement et de la POP, au R&B en passant par le hip-hop et l’électro, c’est une multitude d’influences qui s’entrechoquent pour mieux répondre à ses exigences artistiques. Puisant son inspiration dans ce que le monde a de pire, comme dans ce qu’il a de meilleur mais aussi dans l’ésotérisme et dans les mythes les plus sombres de l’univers, la chanteuse décrit sa musique comme une forme brute et libérée de ce qu’elle considère comme de l’art.

Du basket à la musique

Bien qu’elle ait toujours aimé et utiliser la musique et la poésie pour exorciser ses émotions, c’est à la suite d’un lourd passage à vide que Sevdaliza a décidé de véritablement se lancer dans le grand bain d’une carrière musicale. Née en Iran, elle est venue vivre aux Pays-Bas avec sa famille à l’âge de 5 ans et c’est d’abord dans une carrière de basketteuse professionnelle que l’artiste s’est dirigée. Membre de l’équipe nationale de son pays d’adoption, Sevda Alizadeh a, à l'âge de 23 ans, décidé de tout remettre en question. Ainsi, pour mener à bien son virage professionnel, c’est seule et de manière autodidacte qu’elle a entrepris d’écrire, de composer et de chanter ses propres créations. Posant les bases de son oeuvre, en puisant dans ses croyances mais également dans ses origines et ses connaissances (elle parle 5 langues), l’artiste a dès ses débuts conquis la toile. Alternatifs, pointus et léchés aussi bien musicalement que visuellement, ses premiers travaux ont ouvert la voie à l’album “Ison”, un bijou sonore qui a notamment pu compter sur le déstabilisant single “Human” pour conquérir le public. 

“Shabrang”, ou la mélancolie dans ce qu’elle a de plus riche

Depuis la sortie de son premier album “Ison” paru en 2017, Sevdaliza n’a cessé de parcourir le monde. Sortie grandie de cette expérience, elle a tenté pour élaborer son nouvel opus d’extraire d’elle-même tous les sentiments et toutes les leçons humaines et spirituelles que lui ont apporté son renouveau professionnel. Intitulé “Shabrang” en référence à un terme issu de la mythologie perse, cet opus est le miroir interne d’une femme profondément mélancolique. Retranscrivant à travers les sons mais également à travers sa voix et ses murmures toutes les nuances de son âme, elle réussit au détour des 15 titres qui composent son album, a ancré l’auditeur dans un univers parallèle. Ténébreux et désabusé, “Shabrang” est également gracieusement envoûtant et la bulle que crée son écoute, plonge inévitablement chaque personne qui s’y infiltre dans un rêve cauchemardesque. En effet, dans les productions de Sevdaliza, la frontière entre les émotions est si fine qu’il est souvent quasiment impossible de détecter le ressenti qu’il nous provoque. De “Joanna” à “Habibi” en passant “Dormant” et “Human Nature”, l’artiste nous prouve et se prouve elle a même, qu’elle a bien fait, malgré ses doutes, de tout quitter pour la musique. Préparez-vous, vous ne ressortirez pas intact à l’écoute de cette artiste positivement inqualifiable.