#ITW : Maude : “Je n’ai jamais aimé les étiquettes”
Le 15 avril dernier, Maude a sorti “Unfamous”, un EP de 6 titres sur lequel elle évoque principalement son rapport à la célébrité. Hybride et très différent de ces deux premiers albums parus en 2014 et 2015, le projet est celui d’une artiste qui a connu un succès fulgurant avant de revenir à des choses plus simples, plus essentielles. Ainsi, à mille lieues de la POP colorée qui a fait son succès, la chanteuse se libère des codes et se redessine un parcours plus en adéquation avec la personne qu’elle est réellement. Miroir de sa vie et de son parcours, “Unfamous” est peut-être le dernier projet d’une femme qui a grandi et qui clôt aujourd’hui un chapitre pour en écrire un autre. Humaine et clairvoyante, Maude est une artiste avec la tête sur les épaules, une jeune mère pleine de peps et de nuances qui a compris que la course au succès était vaine. Rencontre sans filtre avec celle que vous ne connaissez peut-être pas encore sous son vrai jour. Rencontre autour d’un nouveau projet, autour d’une carrière et d’un nouveau départ.
Salut Maude, tu viens de sortir ton nouvel EP “Unfamous”. Il s’agit d’un projet un peu plus sombre que les précédents sur lequel tu évoques principalement les déboires de la célébrité. Pourquoi avoir choisi d’illustrer ce thème en musique ?
Je pense que c’est venu assez naturellement car je me suis rendu compte que beaucoup de mes titres parlaient de ça après coup. Je suis une artiste qui écrit sur sa vie et ce que j’écris raconte ce que j’ai vécu ces dernières années. Ce n’était pas un choix, c’était plutôt une honnêteté.
Justement, après un certain succès, tu as un peu disparu des écrans. Tu as eu l’impression de vivre une traversée du désert durant cette période ?
Au contraire, ce qui m’a le plus perturbé, c’est plutôt le succès. Après 3 années passées dans les hôtels, les avions, j’avais besoin de temps pour moi. J’avais besoin de me retrouver pour créer car je ne pouvais plus créer. Forcément, j’ai peut-être un peu subi l’absence du public car c’est addictif d’être aimée, d’être écoutée mais je l’ai aussi choisi, car j’avais besoin de prendre du temps pour moi, pour vivre.
J’ai l’impression qu’à un moment donné, tu as voulu tout arrêter. Est-ce que je me trompe ?
Je ne pense pas avoir voulu arrêter, au contraire. Par contre, l’idée de faire de la musique sous une nouvelle identité me trotte dans la tête. À un moment, j’ai voulu mettre un terme au projet “Maude” et encore aujourd’hui, je pense que c’est quelque chose qui pourrait arriver. Cet EP, je ne pensais pas le faire mais il est là. Le prochain sera peut-être fait en sous-marin (Rires).
Tu as l’impression de souffrir de l’étiquette “Maude” ? Ton projet est différent des précédents. Tu penses que le public t’attend principalement sur un style de musique en particulier ?
Totalement ! Pourtant, j’essaye d’être objective. J’essaye toujours de comprendre les médias, le public. Quand tu regardes mon parcours, il ne ressemble à aucun autre. J’ai toujours connu la scène, l’art et pourtant, on m’a découverte grâce à la télé, grâce à un programme qui m’a propulsée. Je n’ai jamais aimé les étiquettes et aujourd’hui, je travaille à en retirer certaines. Tout est tellement arrivé rapidement qu’on n'a pas eu le temps d’apprendre à me connaître véritablement. Pour cette raison, aujourd’hui, ma musique, mon image peuvent surprendre, mais ça a toujours été moi.
L’identité de ton nouveau projet est beaucoup plus sombre que tes précédents albums. Pourtant, on te connaît pétillante et souriante, c’est ce à quoi tu fais référence ?
En partie. En fait, cet EP, c’est l’autre facette de ma personnalité. Je suis heureuse de vivre, souriante, toujours dans la déconne mais comme tous les artistes, je suis blessée, écorchée. L’EP est certes sombre mais je ne vis pas la nuit, je ne bois pas du sang (Rires). Cet EP, c’est l’autre moi, c’est ma vérité car ça faisait des années que je voulais montrer cet autre moi. On m’a toujours vendu comme la meuf qui fait danser avec des sons d’été mais je n’étais pas que ça.
Quel regard portes-tu sur tes deux précédents albums ?
J’en suis fière et ils sont à l’image de ce que j’avais envie de faire à ce moment-là. À l’époque, j’étais signée sur deux labels différents et c’est compliqué de se faire entendre dans ce genre de situation mais j’ai fait mon maximum pour rester fière de mes projets. Quand j'ai commencé la musique, je voulais faire danser les gens mais j’aurais aussi voulu montrer d’autres choses. J’ai pu le faire un peu plus sur le second album mais pas assez. Ce qui me dérange le plus, c’est l’image qu’on a donné de moi.
Tu as d’ailleurs dit dans une interview que tu t’étais sentie instrumentalisée. Pour quelle raison ?
À l'époque, on voulait que je sois la “girl next door”. La meuf à qui tu t’identifies, celle qui pourrait être ta pote. Je suis plus ambivalente que ça. J’aurais aimé être plus sexy, plus sexuelle mais ça n’aurait pas collé avec l’image que me donnaient mes producteurs. Pourtant, c’était moi.
Aujourd’hui, tu sembles te sens plus libre. C’est plus facile d’être en indé ou c’est au contraire plus compliqué ?
Les deux. D’un côté, je chéris ma liberté car je peux faire ce que je veux. De l’autre, je n’ai plus les moyens que j’avais à l’époque et je dois majoritairement tout gérer toute seule. Aujourd’hui, je fais à moi seule le travail que faisait toute mon équipe. Malgré tout, je me sens plus heureuse comme ça et c’est ça le plus important. Je ne sais pas de quoi demain sera fait, ni à quoi ressemblera la suite de ma carrière mais je suis épanouie et c’est ce qui compte.
Ton projet est assez hybride dans le son qu’il aborde et tu chantes majoritairement en anglais. Tu as conscience que c’est une prise de risque sur la scène musicale française ?
Oui et non (Rires) ! En fait, quand j’ai fait le titre “Pas Normal” par exemple, je me suis dit que c’était cool car ça me ressemblait tout en étant mainstream. Et puis, quand je l’ai envoyé aux radios, les premiers retours étaient : “c’est super cool mais c’est super spé”. Ça me fait rire car j’ai fait tout l’EP comme je le sentais. Et puis, c’est super cool d’être à contre-courant, ça fait partie de la liberté que je m’octroie.
Pour toi qui a connu un gros succès mainstream, de grosses diffusions radios et télés, une nomination aux NRJ Music Awards, ce n’est pas frustrant de redémarrer de zéro avec ce nouvel EP ?
Pas du tout car je n’ai jamais aimé le jeu des médias. C’est pour ça que je suis fière de ma musique et de mon parcours. En tant qu’artiste, on est impuissant face aux quotas radios. La plupart des artistes ne cherchent pas le succès monstre. Bien sûr si tu y arrives, c’est génial mais je pense qu’on veut avant tout se frayer un chemin vers le public, entre entendu, être écouté. On devrait avoir le droit d’être différent, de tenter des choses sans forcément rentrer dans une norme qui correspond au succès du moment.
Tu collabores sur ce projet avec Helmut Fritz et Quentin Mosimann. Comment se sont passées ces collaborations ?
Hyper bien ! Pour Eric, alias Helmut Fritz, on s’est rencontré à une soirée et quand il a appris que je venais d’une émission de télé, il m’a dit : “Non mais c’est pas possible, pourquoi toi ?” et on en a rigolé. C’est un gars bourré de talent qui écrit super bien mais tout le monde s’arrête au personnage qui l’a fait connaître. Quant à Quentin, ça faisait des années qu’on voulait travailler ensemble, on a juste dû trouver le bon moment dans nos emplois du temps.
Dans un tout autre registre, tu es devenue maman. Comment envisages-tu ton avenir professionnel et musical maintenant que tu as passé ce cap ?
Honnêtement, je n’ai jamais eu le souci des choses matérielles. L’argent est toujours passé après ma passion. Aujourd’hui, je suis mère mais je n’ai pas peur de l’avenir. Je vis dans le présent, je m’empêche d’être une personne angoissée. Le plus important pour moi, c’est que mon enfant soit heureux, avec un toit, de quoi manger. Je ne sais pas pourquoi mais même si demain la musique ne marche plus, ça ne me stresse pas. (Rires).
Tu as également écrit un livre sur la maternité**. C’est un livre très différent de ce qu’on peut lire d’habitude sur le sujet. Comment t’es venue cette idée ?
Quand j’étais enceinte, je cherchais à lire des choses et je n'ai rien trouvé qui correspondait à ce que je vivais. En discutant avec d’autres mamans, je me suis rendu compte que c’était pareil pour elles. Du coup, je me suis dit : “en fait, la maternité ça n’a rien à voir avec ce que vous croyez” (Rires) et j’ai décidé de faire ce livre. Un peu comme pour la musique, c’est venu assez naturellement en parallèle avec ma vie.
Tu pourrais devenir Youtubeuse comme beaucoup de mères actuellement ?
Pas du tout ! (Rires). Déjà, parce que je déteste parler de ma vie privée. Je montre une partie de moi sur mes réseaux sociaux mais je garde le principal. Ensuite, j’ai écrit ce livre avec des dizaines d’autres mamans parce que je voulais montrer la pluralité des situations. Si j’écris à nouveau, ça sera sur les femmes et leurs différences...
**Maude Harcheb, "la grossesse: toute la vérité, rien que la vérité"
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