#ITW : Dolche : “On ne peut pas échapper à l’amour. Il gagnera toujours”


Depuis 2017, Christine Herin est Dolche, un OVNI musical fort et percutant. Ayant grandi dans un petit village du Nord de l’Italie, elle a nourri sa fibre artistique dans la chorale de son église. Par la suite, animée par l’envie de partager, elle a entamé sous le pseudonyme Naïf Hérin, une carrière sur la scène indépendante. Riche de 5 albums et de multiples rencontres, ce chapitre de sa vie s’est aujourd’hui refermé et l’artiste revit aujourd’hui au son de Dolche. Humaine et sincère, elle se sert de la musique comme d’une palette de couleurs afin de communiquer et de transmettre art et amour. Précurseurs de l’album “Exotic Diorama” à paraître prochainement, les singles “Psycho Killer”, “Canzone d’Amore” et “Supernova” sont les premiers résultats d’un travail de 2 ans qui promet de nous emmener sur des terrains musicals aussi envoûtants qu’inattendus. À cette occasion, The Melting POP a pu poser quelques questions à Dolche. Rencontre avec une artiste unique qui va vous bouleverser.

Expansif et touchant, l'univers de Dolche se dessinera bientôt davantage sur l'album "Exotic Diorama"
Expansif et touchant, l'univers de Dolche se dessinera bientôt davantage sur l'album "Exotic Diorama"

Bonjour Dolche, tu présentes un univers singulier fort et bourré d’influences. Comment en es-tu arrivé à créer ce son ?

Bonjour Jay. Merci à The Melting POP de soutenir la musique indépendante et les fous qui la créent. Je suis contente que tu parles de mon son comme d'un univers. Quand je suis dans la musique, dans les notes, je me sens comme transportée dans une galaxie différente. Par contre dans mon enfance, j'ai écouté plus de silence que de musique. Je n'avais pas facilement accès à la musique dans le petit village où j'ai grandi et ma famille n'avait que de vieux vinyles de musique populaire qu'on jouait pour danser. C’était les années 80, mais l'isolement des grandes montagnes nous avait congelés dans les années 40. Les sons, ou plutôt les bruits, qui sortent de ma tête étaient déjà là quand j'étais très petite, peut-être suggérés par la nature et les animaux. Mais je ne savais pas qu'il s'agissait de musique, je l'ai découvert plus tard. Si tu écoutes mes chansons, il y a beaucoup de sons et de bruits enregistrés dans la nature. C’est seulement après, à l'âge de 14 ans, quand on a ouvert une bibliothèque dans la ville avec une section musicale, j'ai découvert la soul avec la voix d'Aretha Franklin, la musique française avec la voix d'Edith Piaf, les mots d'Aznavour et la musique classique. Après ça, Gainsbourg ou encore Prince..

Ce qui est marquant dans ta musique, c’est que ta voix semble appartenir à une autre époque, ce qui lui donne une profondeur captivante. Quand et comment as tu compris que ta voix était un point fort ? 

Peut-être que tu as raison, je suis d'une autre époque (Rires) ! Je me rappelle avoir commencé à chanter dès mes premiers souvenirs. Dès que je pouvais marcher toute seule je me cachais dans le choeur de l'église et mon père m’a souvent dit que je tenais la partition à l'envers dans mes mains... Je ne savais même pas encore lire mais je faisais des harmonies (Rires). J'ai réalisé très tôt que ma voix était particulière, les adultes pleuraient toujours quand je chantais, c'était comme regarder un tout petit miracle pour eux. Pour moi, à l'époque, leurs larmes étaient bizarres. Peut-être que dans mon timbre de voix, il y a quelque chose qui touche les cœurs. Ça se passe souvent encore aujourd'hui : je fais pleurer les gens. Mais maintenant je sais ce qui se passe. Je sens que les gens sont connectés avec moi et quand ils pleurent c’est d'émotion. Je les assiste avec ma voix et je les remercie de m'avoir accueillie dans leur cœur. C'est un honneur.

Ton accent joue également un rôle très important dans ta manière d'interpréter. Tes origines sont importantes à retranscrire dans ta musique ?

J'aime quand les personnes parlent d'autres langues avec leur accent d'origine. C’est une sorte de marque vocale. Tous les peuples du monde ont un accent différent et, au sein d'une même communauté, des inflexions différentes. Notre accent fait partie de notre histoire. La musique a un pouvoir qui va au-delà de toute tentative d'être parfait. J'aime chanter en utilisant plusieurs langues pour parler à plusieurs personnes dans une façon qui leur permet de comprendre et de goûter les chansons que j'écris. J'ai grandi dans la seule région bilingue de l'Italie et notre français est resté dans la gorge des plus hautes montagnes d'Europe pendant des siècles. Nous sommes bien loin d'avoir une prononciation parfaite mais c'est réel. C'est notre langue, c'est notre histoire, on l'apprend à l'école et on est bien fiers d'avoir gagné le droit de parler encore le français depuis la chute de Mussolini, qui l'avait interdit. Ma famille le parlait en secret à la maison. Le besoin de communication va au-delà des accents et des mots. En même temps, il est important de préserver la diversité linguistique. Il ne faut jamais avoir honte de ce qu'on est. Je rêve d'un monde dans lequel chaque personne parle sa langue et les autres répondent avec leur langue parce que tout le monde se comprend. Instagram, Facebook se dirigent vers ce résultat. Ils nous permettent de traduire facilement les commentaires et de rapprocher les personnes qui vivent très loin de chez nous. C'est pour cette raison que j'encourage toujours les personnes qui m'écrivent et qui s'excusent parce qu'ils ne parlent pas bien anglais, à s'en foutre ! Ce qui est important, le miracle, est qu'on a des instruments pour communiquer.

Ton dernier single s’intitule “Supernova”. Peux-tu nous parler de ce morceau et de son texte. Cet amour dont tu parles, c’est du vécu ? 

“Supernova” est le titre d'une poésie que ma femme Chiara a écrit et qui m'a inspiré immédiatement à écrire une chanson. Les mots de ma chanson sont sorties comme un fleuve avec la musique au cours d’un après-midi. Je parle, bien sûr, de l'amour que j'ai trouvé. On était toutes les deux, pour différentes raisons et parcours de vie, dans un moment de grand changement et de métamorphose et on s'est retrouvées par hasard. Comme l'explosion d'une Supernova détruit une entière galaxie et tout ce qu'on connaissait avant. Ainsi l'Amour a le même pouvoir de créer une étoile noire et un autre univers. C'est plus grand et plus fort que nous. Je n'ai rien pu faire d'autre. Comme dans ma vidéo. La créature géante qui me suit dans le désert du canyon n'est que le symbole de l'amour. On ne peut pas vraiment échapper à ça. L'amour va toujours gagner.



Tu es loin d’en être au début de ta carrière. Pourtant, ce nouveau single qui est précurseur d’un nouvel album semble être le signe d’un renouveau. Est-ce que je me trompe ? 

Pas du tout ! Avec cet album, j'ai eu l'occasion unique de faire exactement ce que je voulais du point de vue artistique. Cela a été possible grâce à un homme incroyable et à sa femme qui ont décidé de m'aider et de soutenir mon art. Il a fallu deux ans de recherche et de travail intense. Maintenant, je dirige un petit label indépendant pour être complètement libre de créer des sons qui expriment purement ma vision, mon style, ma musique, et j'espère un jour pouvoir aider d'autres artistes à s'exprimer de la même manière. J'ai eu l'honneur de travailler avec des musiciens que j'ai choisi dans plusieurs pays du monde; de Tel Aviv à Beyrouth, de la Suède à l'Arménie. J'ai pu mélanger world music et pop, rock et folk, musique traditionnelle francophone et électronique. Chaque chanson de l'album est un univers en soi. Chaque titre a un style et des sons complètement différents. Malgré tout, on peut toujours reconnaître une empreinte commune, une uniformité, une harmonie. Mon album parle de notre temps, de multiculturalisme, de multilangage, d’amour, de passion, de résistance et d’engagement avec un accent du passé.

Tu as travaillé avec de grands producteurs pour ce nouveau projet. D’où t’es venue l’idée de te tourner vers ces personnes ? 

La recherche des producteurs a été longue parce que j'ai un produit qui n'est pas vraiment assimilable à un seul genre musical. En plus, je voulais être coproductrice de mon travail. J'ai choisi Tobias Froberg par son goût viscéral, poétique et ses sons pleins de matière. J'aimais beaucoup Ane Brune, une musicienne Suédoise et Tobias était son producteur. Quand je lui ai parlé, j'ai compris qu'il était un viking rock’n’roll avec une âme de biche je n'ai plus eu aucun doute. Pour Al Schmitt, c’est un génie. Il a gagné 23 Grammy Awards et travaillé avec tous les plus grands noms de l'histoire de la musique, de Sinatra à McCartney. C'était un honneur de travailler avec lui et de chanter avec le même micro utilisé par Sinatra. Enfin, pour Jad Rahbani, ça a été un coup de coeur. Son goût d'orient a été très important pour moi. Rien n'est arrivé par hasard.


J’ai lu qu’on te comparait souvent à Feist ou encore Björk, ce sont des artistes avec une identité forte. T’ont-elles inspirées ? 

Quand Emilie Lazard m'a dit qu'elle voulait maintenir toutes les particularités sonores et les folies de ma musique parce qu'il s'agissait, selon elle, d'une oeuvre d'art qui lui rappelait le travail de Björk, j'ai pleuré de joie. J'ai toujours été inspirée par les musiciens qui vont au-delà du standard. Björk, Feist, mais aussi David Bowie, Prince, Gainsbourg, Aznavour, Nick Cave, Cohen, Peter Gabriel, David Byrne, Joni Mitchell.

Ta musique est également visuelle. On le voit dans ton dernier clip. Est-ce important pour toi de prêter attention à tous les aspects artistiques de tes oeuvres ? 

Essentiel. Chaque aspect de mon projet est le résultat d'une étude. Chaque photo, chaque vidéo, chaque histoire, tout est créé avec Chiara et mon équipe, grâce à des jours et des nuits d'intense travail et d'inspiration. La recherche de chaque artiste qui travaille avec nous est toujours le produit d'une longue recherche et de brainstormings sans fin. J'ai des cornes sur la tête pour me rappeler qui je suis, car dans ce monde, il est facile de perdre le focus. De là où je viens, la vache est un symbole important. Elles sont vénérées par la population et chaque année elles sont célébrées durant une grande fête où on les orne avec des couronnes de fleurs comme la mienne. Elles sont le plus beau souvenir de mon enfance et pour cette raison, j'ai décidé de poser des cornes et des couronnes de fleurs sur ma tête. Pour ce nouveau projet, tout fait partie d'une vision artistique unitaire, qui ne pourrait être cloisonnée.

Dernière question, à quoi ressemblera ton prochain album. Comment le décrirais-tu si tu n’avais que 3 mots pour le faire ?

Je vais le faire en deux mots : un “Exotic Diorama”.

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